Le Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine a ouvert ses portes, deux jours durant, aux professionnels pour le Focus, festival de la ruche. Un focus foisonnant et convivial, pour découvrir des créations en bourgeon.

Alors que les salles de spectacle s’apprêtent enfin à rouvrir, le TNBA a maintenu la première édition de son focus festival, sous l’impulsion de sa directrice, Catherine Marnas. Des compagnies sont donc présentes. Ainsi que des directeurs de théâtre, de festivals de Paris, Limoges ou Cognac. Puisque l’on est, Covid oblige, entre professionnels, ce focus est aussi l’opportunité de prendre le temps d’aborder des thématiques délicates. Ainsi le deuxième jour s’ouvre-t-il sur une table ronde qui questionne l’éthique de la relation entre équipes artistiques et lieux culturels. Un directeur (Sébastien Bournac) et des artistes compagnonnes et compagnons (Baptiste Amann, Aurélie Van Den Daele et Vanasay Khamphommala) du TNBA débattent. Les compagnies confrontent leurs éthiques, font part de leurs expériences dans ces relations parfois très verticales. Les directeurs (nombreux dans la salle) parlent des contraintes inhérentes à leurs fonctions. Comment gérer en confiance ces ressources humaines si particulières ? Les problématiques vont de l’accueil à la médiation culturelle, en passant par la vulnérabilité des artistes. La vulnérabilité il en est beaucoup question dans les neufs projets présentés. Dans Sola Gratia, Yacine Sif El Islam exorcise une agression barbare dont il a été victime avec son compagnon. Les spectateurs en sortent les larmes aux yeux.

La vulnérabilité est aussi au cœur de la future mise en scène de Catherine Marnas, directrice du TNBA. Un spectacle autour du témoignage d’Herculine Barbin, élevée comme une femme jusqu’à ce qu’un examen médical la définisse comme un homme, qui se suicida à 29 ans. C’est un travail à la table attirant. Catherine Marnas (entourée à la dramaturgie de Vanasay Khamphommala et de Yuming Hey, comédien « gender fluide » pour le rôle d’Herculine) explique que ce spectacle poétique et politique interrogera le vertige et la complexité des questions de genre. Dans Mine de rien, Jérémy Barbier d’Hiver (excellent comédien) propose un regard sur le handicap tendre, drôle et politiquement incorrect, à travers l’histoire d’un garçon simplet (Jérémy Barbier d’Hiver) qui s’occupe de sa mère léthargique (incroyable Julie Teuf). Une famille explose dans Un couteau dans la poche par Les rejetons de la Reine. Cette comédie acide de Simon Delgrange, entre le boulevard et l’absurde, suscite de nombreux fous rires. Elle est portée par des comédiens époustouflants, issus de l’école du TNBA. Avec Le courage des oiseaux, Baptiste Amann livre le journal de bord des Territoires, qu’il présentera au Festival d’Avignon. Là aussi la vulnérabilité est à l’œuvre. Entre deux présentations, sous les platanes, les voix des spectateurs et des artistes bourdonnent dans l’air comme un essaim d’abeilles. Le plaisir de ce festival, c’est peut-être aussi la certitude que ces maquettes sont autant de promesses de créations à venir. Pour tous. 

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