Dans le cadre du festival « Avant la nuit » des Plateaux Sauvages, grande fête théâtrale de réouverture du lieu au public, Pauline Sales présente Normalito, une ode puissante à la tolérance sur fond de quête d’identité. 

À l’école, la maîtresse de Lucas, dix ans, invite chacun de ses élèves à imaginer le superhéros, qu’il rêverait d’être. Contrairement à ses camarades qui s’inventent des superpouvoirs, le jeune garçon aimerait juste être Normalito, un personnage capable de « rendre tout le monde normaux. » Avec l’accord, ce serait plus juste, mais clairement moins beau sans la rime. Les rires fusent, les moqueries. C’est l’incompréhension totale. Il faut dire qu’à l’inverse de ses congénères, Lucas n’a pas de singularité. Il n’est atteint ni de troubles « dys », ni précoce, ni handicapé. Il est juste banal, un ado ce qu’il y a de plus commun. Être « normal nul » comme il dit, ça lui pèse, le met à l’écart. Il ne cherche pas pour autant à changer, il souhaiterait juste un monde où tous seraient comme lui, où toutes différences seraient abolies. 

Face aux railleries, à ce que sa prof estime être de l’intolérance à l’égard des autres, il fuit, se réfugie dans les toilettes. Très vite il est rejoint par Iris, une jeune fille à haut potentiel, une enfant « zèbre », en quête de simplicité, de normalité. Entre ces deux êtres que tout oppose, sauf peut-être l’impression de ne pas être au bon endroit, une sorte de complicité fait jour. Lui vient d’une famille de bobos, fan de design, un peu triste d’avoir un enfant trop terne. Elle d’un milieu plus populaire, dépassé par ce petit génie en herbe. En décalage avec leur vie, rêvant d’inverser leur place, ils décident de fuguer ensemble, d’errer dans la ville. D’aventures rocambolesques en rencontres surprenantes, notamment avec Lina, une dame pipi, qui dans une autre vie s’appelait Alain, les deux ados vont affronter leurs préjugés, être confrontés à leurs contradictions, et prendre au passage une jolie leçon de vie et d’amour qui va les changer à jamais. 

D’une plume pleine de délicatesse, d’ingéniosité et de poésie, Pauline Sales imagine un conte contemporain de très belle facture. Elle entraîne les spectateurs de 8 à 77 ans dans un voyage qui déconstruit les idées reçues et invite à voir autrement, les notions de banalités et de différences. En décalant son propos, en abordant la normalité pour mieux mettre en exergue le droit à la singularité, elle signe un magnifique hymne à la tolérance. 

Dans un décor de toilettes publiques conçu par Damien Caille-Perret, le trio de comédiens – Chloé Lastère, Antoine Courvoisier et Anthony Poupard – s’en donne à cœur joie. Ils habitent avec leur douce folie les mots de Pauline Sales, les incarnent avec légèreté et espièglerie. Et, dans une dernière pirouette, un effet de manche bien senti, ils livrent une simple vérité, une recette du vivre ensemble : être soi, s’aimer tel que l’on est. 

Normalito de Pauline Sales, aux Plateaux Sauvages, les 1er et 2 octobre 

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