Un festival dédié à l’empreinte de l’homme sur l’environnement. C’est le pari audacieux, lucide mais non anxiogène deValérie Baran, directrice passionnée du théâtre du Tangram à Evreux. Avec Les Anthroposcènes, elle sème les graines d’un grand festival poétique mêlant spectacles, cinéma, conférences et immersions dans la nature.

Que signifie ce mot un peu étrange : « anthropo-scènes » ? 
C’est en lien avec l’anthropocène, l’ère géologique qui débute lorsque l’homme a laissé pour la première fois une empreinte définitive sur Terre. Cette empreinte soulève un certain nombre de questions sur l’homme, son destin et ses liens avec la Terre. L’intérêt pour ces questions est fort, nous voulions les aborder de façon sérieuse mais aussi joyeuse. Des solutions existent. En ces temps sombres, les gens ont besoin d’horizons nouveaux ! 

Pourquoi proposer en intégralité la Trilogie terrestre de Bruno Latour, mise en scène par Frédérique Aït-Touati, en ouverture du festival ?
Chaque volet dure 45 minutes. Inside explique, de façon accessible, la zone critique, l’endroit où se concentre la biodiversité du vivant. Moving Earth montre que la Terre « se meut » et s’émeut face aux actions humaines. Viral présente l’homme comme un agent pathogène pour la Terre. Ces pièces proposent une nouvelle façon de réfléchir à notre façon d’habiter et penser le monde. C’est l’objectif du festival durant ces deux semaines.

Il y a aussi Jeanne Dark. Cette performance de Marion Siéfert, visible sur Instagram, lui avait permis de détourner le confinement. La programmer hors de ce contexte signifie-t-il qu’on se dirige vers du spectacle vivant-virtuel ? 
Le confinement a accéléré le phénomène de façon considérable, nous sommes de plus en plus connectés et présents sur nos écrans. Le virtuel a un impact fort, notamment sur des adolescents parfois en totale perte de contacts sociaux réels. Le festival est une invitation à renouer avec la nature. Sans se déconnecter du virtuel mais en donnant à y réfléchir. Jeanne Dark montre combien il gagne de plus en plus nos vies et nos professions, pour le meilleur et pour le pire…

Marielle Pinsard joue un vaudeville « « écolo-connecté » « bio et bobo ». Peut-on encore recourir à l’humour pour parler de l’état de la planète ?
Oui ! L’humour permet de toucher les gens différemment. Je crois que la collapsologie et le catastrophisme ne sont pas porteurs… Sans être climato-sceptique, Marielle Pinsard se moque de nos petits arrangements écolos… 

Pourquoi proposer également des ateliers immersifs en forêt ? 
C’est une invitation à se reconnecter à la Nature. Le territoire d’Évreux est constitué de 600 hectares boisés ! Cela permet des immersions en forêt, notamment dans ses parties les plus secrètes. Entre les films, les conférences, les états généraux de l’anthropo-scène que l’on situe en 2090, des projections de films d’art et des documentaires, le festival est constitué de 80 manifestations dans 20 villes du département !  

Festival Les Anthroposcènes au Théâtre du Tangram du 29 avril au 15 mai