image editoCe numéro 97 est très littérature étrangère. On retrouve Joseph O’Connor, qu’on suit depuis longtemps dans ces colonnes, plus cool que jamais. Plus rock que jamais. Son éditeur me disait que dans le taxi qu’il avait pris avec lui pour l’amener à son hôtel, l’auteur lui avait confié qu’avec l’âge (cinquante-deux ans), on a envie d’être un peu moins noir, un peu plus léger. C’est effectivement ce que fait à merveille O’Connor dans son dernier roman, Maintenant ou jamais (Phébus), dans lequel il raconte avec allégresse l’histoire d’un petit groupe de rock amateur devenu un band  de légende. Cette histoire fictive est prétexte à revisiter ‘histoire du rock, de la pop, du punk anglo-saxon des années soixante-dix et quatre-vingt. Fans des Stooges, des New Yorks Dolls, des Pogues, de Nick Cave, de Tom Waits, des Stones, du Velvet, de Bowie, lecteurs de Nick Kent, de Lester Bangs, Greil Marcus, ce livre est pour vous.

Fidèle à ses convictions, Transfuge  découvre : retenez ce nom, Zia Haider Rahman, et le titre de son premier roman, À la lumière de ce que nous savons  (Christian Bourgois). Romancier cosmopolite, anglais d’origine bangladaise, encensé à juste titre par le New Yorker  – quatre pages signées James Wood –, Haider Rahman passe des mathématiques à la politique internationale, à la philosophie du droit. Son érudition est sans limites, un gai savoir. Mais l’érudition se double d’une histoire personnelle incroyable. Haider Rahman est né dans un village pauvre du Bangladesh, immigre en Angleterre, entre à Oxford, découvre l’aristocratie anglaise, puis devient trader à Wall Street, et lâche tout pour entrer dans l’humanitaire. Ce qui lui permet de côtoyer la haute société anglaise et américaine et, à l’instar d’un Fitzgerald, d’en faire une peinture satirique. Amis de la littérature, ne ratez pas ce roman total.

Retour aux Français avec un essai stimulant de Philippe Vilain sur la littérature française contemporaine, La Littérature sans idéal  (Grasset). Trop d’écrits consensuels ? Trop d’écrits sociologiques ? Trop d’écrits narcissiques ? Et le style, plus personne ou presque n’en parle ? On lui donnera raison sur ce point. Quand je repense à Sylvain Bourmeau qui décrétait la fin du style dans Libération  – quelle connerie !

Vilain, avec rigueur, analyse ce qui selon lui nuit à la littérature et en ferait un objet deconsommation comme un autre, sans intérêt. La faute à qui ? À la marchandisation des biens culturels ? À sa démocratisation ? Sur ce dernier point, l’ami François Bégaudeau ne pouvait laisser passer ça et entra dans une colère noire (il paraît même qu’il aurait jeté le livre sur le mur de sa cuisine, puis enchaîné quelques bières pour oublier). Il a depuis repris son calme, et a répondu à Vilain point par point.

Bonne lecture, amis lecteurs !