Huitième édition de ce festival consacré à la plus noble des activités humaines, la lecture. La présidente du CNL, qui organise le festival, Régine Hatchondo, répond à nos questions.

Le festival se déroulera sous les auspices d’un parrainage bicéphale – la philosophe et écrivain Claire Marin mais aussi, peut-être plus surprenant à première vue dans le contexte de la lecture, le chorégraphe Angelin Preljocaj. Pourquoi ce choix ?

On aime brasser des profils artistiques différents, dans l’objectif, qui est notre obsession, de décloisonner le livre. Le thème de la manifestation sera le corps sous toutes ses formes, aussi avoir un chorégraphe comme Angelin Preljocaj, qui a également brassé les divers champs artistiques, nous paraissait répondre à notre envie de représenter le corps en faisant appel à des approches différentes. Tous les aspects sont importants : le corps violenté – la guerre, les violences faites aux femmes, aux enfants –, le corps enfermé… Mais le corps n’est pas qu’un objet de souffrance ! Et j’espère que nous parlerons de la douceur du corps, tel qu’il apparaît de façon poétique dans nombre de textes, de la jouissance. On pourrait aussi parler du corps politique, de la façon dont on peut s’engager à travers lui…

Ou du corps du lecteur – un corps itinérant, en tout cas pour les Nuits de la lecture, tant la variété des lieux est frappante…et parfois inattendue !

Vous avez raison de mentionner le corps du lecteur, car la lecture a un effet bénéfique sur celui-ci. Michel Desmurget, par exemple, dans ses livres sur la lecture, rappelle que la lecture est la pratique qui calme le plus. Pour en revenir à votre question, l’an dernier, 8000 événements ont eu lieu dans le cadre des Nuits de la lecture et beaucoup d’initiatives, ce dont je me réjouis, ne viennent pas de nous, mais d’associations, de gens du théâtre ou du spectacle vivant, avec cette année un partenariat fort avec l’Association des Scènes nationales. Certains centres d’art contemporain se sont aussi emparés des Nuits de la lecture, et nous serons très présents bien entendu dans les bibliothèques, les médiathèques, les librairies, mais nous serons aussi dans des musées, dans les catacombes, dans beaucoup de lieux où on ne nous attend pas – même dans une piscine avec des textes lus à voix haute.

On aurait pu croire que la lecture était une activité essentiellement solitaire, mais tous ces lieux sont des espaces collectifs…

C’est un de nos objectifs prioritaires. Nos études sur les jeunes et la lecture ont montré que 40% d’entre eux craignent que cette activité les isole des autres, puisqu’elle relèverait d’un plaisir solitaire. Ce qu’elle est d’ailleurs, mais nous voulons rompre avec l’idée qu’elle est seulement solitaire. Ne serait-ce que du point de vue des imaginaires dans lesquels elle nous emporte : nous y sommes en contact constant avec d’autres que nous-mêmes. Mais on observe aussi sur les réseaux sociaux une mode qui nous fait particulièrement plaisir, l’organisation de clubs de lecture numériques et virtuels, qui prouvent qu’en partageant des goûts, des accords et des désaccords autour du livre, on crée du lien. Et, par des lectures à voix haute, dans des lieux publics, nous démontrons combien la lecture peut être un sujet de lecture partagé.

Les Nuits de la lecture, la 8e édition du 18 au 21 janvier 2024, découvrez le programme