C’est un festival effervescent dans lequel de jeunes artistes programment de jeunes artistes. Le WET° (WeekEnd T°) de Tours fait la part belle aux femmes et aux corps avec une dimension internationale non négligeable.

Lorsqu’on fait remarquer à Jacques Vincey, directeur du Théâtre Olympia de Tours, à l’initiative du WET°, que douze spectacles (dont L’Armoire polyphonique, un « cabinet d’études de la chanson » itinérant) sur un week-end c’est tout de même beaucoup, le metteur en scène récuse en souriant : « Il y a tant de propositions passionnantes qu’en sélectionner seulement douze c’est beaucoup de renoncement ! Tellement plus mériteraient d’être accueillis ». Cette sélection ne lui incombe pas. Il la couve de loin, donnant si besoin conseil aux artistes permanents du théâtre Olympia, le « camp de base » du WET°. Le festival investit aussi différentes salles de la métropole, invitant les spectateurs à s’y rendre ensemble « cela permet des rencontres, parfois fécondes, notamment entre les créateurs », explique Jacques Vincey. Avec une dimension internationale, qu’il justifie avec humour. « Tours, c’est à peu près le centre de la France mais on peut vite y tourner en rond et se regarder le nombril. Il ne s’agit pas de perdre son âme mais cela n’a pas de sens de se conforter dans un petit cercle ». Le WET° c’est aussi des premières fois en France. Notamment d’un Brésilien, Orun Santana qui convoque avec Meia Noite la mémoire ancestrale du corps dans la culture afrobrésilienne. Et d’autres créations internationales, à l’instar de Koulounisation de Selim Djaferei ou encore It Dont worry me, dont les langues (anglaises et catalanes) sont le reflet du cosmopolitisme des artistes qui le portent. Par ailleurs, ces spectacles sont souvent traversés par la question du regard des femmes et des hommes sur le corps, et des violences à l’encontre des femmes. Ainsi 37 heures, de la Tourangelle Elsa Adroguer est-il un récit intime. Un « conte de faits » dans lequel la vie d’une adolescente bascule le jour où elle rencontre Christian, son moniteur d’auto-école, premier « prince charmant », qui la viole pendant des années. « C’est un spectacle qu’elle polie depuis des années, elle a trouvé une forme, qui déborde de l’autofiction et nous touche tous en nous faisant réfléchir, notamment parce qu’elle la dote d’un humour qui fonctionne comme une soupape », précise Jacques Vincey. Les comédiennes de Beauté fatales’emparent de l’essai de Mona Chollet, dans un spectacle jubilatoire et subversif, qui pousse à l’absurde les injonctions à la beauté subies par les femmes. Les injonctions de genre sont aussi au cœur de Cow Boy de Delphine de Baere. On y découvre combien ces archétypes virilistes sont des « masques existentiels ». « C’est un western qui flirte avec Beckett, dont les héros guère reluisants dévoilent une part d’humanité », dit Jacques Vincey. Quant à Strip de Julie Benegnos, expérience empreinte de réalité virtuelle, elle interroge le regard que nous portons sur l’érotisme. Une édition opulente, qui aborde avec le brin de folie nécessaire des thèmes essentiels. 

Festival WET°, tremplin festif pour l’émergence et la jeune création, à Tours, du 25 au 27 mars 2022.