Carlotta pour notre plus grand bonheur ressort un coffret sur le cycle Antoine Doinel de François Truffaut, avec des bonus de grande qualité.
An-toi-ne-Doi-nel, An-toi-ne-Doi-nel, An-toi-ne-Doi-nel, devant son miroir Jean-Pierre Léaud détache une à une les syllabes de son nom et dédouble François Truffaut, rejouant pour lui une part de son enfance, son adolescence, ses rébellions, ses amours et ses déceptions. Qu’il travaille chez un disquaire ou qu’il repeigne des fleurs dans une cour d’immeuble, qu’il suive des gens avec son journal tel un détective malhabile ou qu’il écrive Les Salades de l’amour, il reste ce perpétuel enfant en mal de mère, en lutte contre l’autorité qui s’évade de la maison de redressement dans laquelle on l’a enfermé pour courir sur une plage et nous livrer un long regard caméra. Un regard qui d’emblée nous interdit de le juger : un acteur est né. Il s’appelle Jean-Pierre Léaud et nous allons le voir grandir et vieillir au cinéma sous l’œil complice de son double et mentor Truffaut. Bien sûr, il sera aussi assistant de Jean-Luc Godard et acteur chez JLG puis chez Eustache, etc. Revenons à Truffaut et aux aventures d’Antoine Doinel que Carlotta fait paraître en coffret Blu-Ray 4K et ressort au cinéma. Les 400 coups (1959), Antoine et Colette (1962), Baisers volés(1968), Domicile conjugal (1970), L’amour en fuite (1979), vingt ans séparent le premier film du cycle Doinel du dernier qui n’aurait peut-être pas été le dernier si François Truffaut n’avait trouvé la mort en 1984. Lorsqu’un film est terminé depuis plusieurs mois, le laboratoire demande l’autorisation de détruire la pellicule « des doubles, des chutes » qui encombrent. Truffaut explique : « Pour la plupart de mes films je donne facilement cette autorisation, pour le cycle Doinel je ne m’y résous pas car j’ai l’impression que la pellicule consacrée à Jean-Pierre Léaud et le fixant chaque fois dans une étape différente de son développement physique est plus précieuse que lorsqu’il s’agit de protagonistes adultes. » Eternel adolescent, Léaud est un personnage prisonnier de la pellicule Truffaut et qui s’en émancipera pourtant. À la naissance du cinéaste Truffaut répond la naissance de l’acteur Léaud et celle d’un personnage, nommé Antoine. An-toi-ne-Doi-nel. Serge Toubiana souligne : « Plus Truffaut filmait le jeune acteur, plus il le rendait présent et attachant, grave et triste, sournois et audacieux. » Doinel-Léaud impose sa silhouette et sa fougue au cinéma français. Sous nos yeux ébahis, il se cabre, fugue, tente de travailler, écrit, aime, tourbillonne, trahit, se perd en filatures et en fuites, encore, toujours. Doinel tombe amoureux de la nuque dénudée de Colette (Marie-France Pisier), de la queue-de-cheval de Christine (Claude Jade) qu’il demande en mariage en lui passant au doigt un décapsuleur, d’une apparition blonde qui répond au nom de Mme Tabard (Delphine Seyrig) avec son visage à l’ « ovale très pur » et son « air très vague, très doux » puis d’une Sabine (Dorothée) au portrait déchiré à recoller comme un dernier amour qui fuite.
Coffret Les Aventures d’Antoine Doinel chez Carlotta (Truffaut)