Jos Houben fait du rire un terrain de jeu et de recherche. Entre anthropologie et philosophie, comédie et critique sociale, le comédien flamand s’avance seul en scène pour L’Art du rire et L’art 2 rire.


Qu’est-ce que 
L’art du rire, un spectacle, une master class, un cours d’anthropologie ? 

C’est tout ça ! C’est une macédoine, un objet hybride où tel un conférencier je partage avec le public des réflexions, des observations et des questions sur le rire. Et ça devient progressivement du théâtre. 

Qu’est-ce qui vous a donné envie de travailler sur le rire ? 

Les bandes dessinées de Gaston Lagaffe, les cartoons ou des comédiens comme Buster Keaton me passionnent depuis l’adolescence. Cela me faisait rire et j’étais touché et plein d’admiration pour leurs constructions. Quelques années plus tard, j’ai créé un spectacle sans thème dont le seul but était de rire tout le temps. J’ai découvert que ne plus être prisonnier du sens, jouer sur son absence donnait des délires presque thérapeutiques. C’est comme une fissure dans les logiques de la réalité, c’est presque spirituel et cela devient de plus en plus important dans mon travail.

Pourquoi donner une suite à L’art du rire ?

Je n’ai jamais voulu donner de suite. L’art 2 rire part surtout d’un travail de laboratoire, qui est devenu un spectacle lorsque j’ai commencé à analyser l’équilibre social, la recherche permanente d’une tentative d’accord pour exister ensemble dans la société. C’est moi et les autres. Et il me semble aussi que la présence physique de l’autre est quelque chose de très actuel. Dès qu’il y a deux personnes, on est sur la corde raide et il y a un conflit potentiel. 

Et ça c’est drôle ? 

Évidemment ! C’est la comédie de situation : la commedia dell’arte, Molière, etc. L’autre nous exaspère parfois mais on ne peut pas faire sans lui ! Cela génère des malentendus, des rapports qui font rire. C’est ce que j’explore avec Bernie Collins qui fait partie du duo clownesque génial DP Zoom. Il a écrit L’art 2 rireavec moi et on le joue ensemble. C’est un laboratoire qui évoluera en fonction des spectateurs. 

Quelle relation entretenez-vous avec le public ? 

Je suis touché par sa présence. Il me fait l’honneur de me donner son temps. Je ne suis pas sur scène pour briller mais pour qu’on s’étonne ensemble. Je ne cherche pas à transmettre un message, juste à créer un peu de circulation entre les êtres humains, un peu d’air et de distance. C’est de la tendresse. 

Le besoin de rire est-il plus fort lorsque l’on traverse des épreuves ? 

Oui ! Le public me le dit. Et surtout de rire ensemble ! Depuis le confinement, on tend vers l’autre à travers nos écrans, les gens se sont efforcés de faire rire en faisant ou en échangeant des vidéos. Cela m’a beaucoup touché. Les artistes ont besoin de voler, comme des cerfs-volants au-dessus des gens. Il faut trouver de belles images pour apporter une lueur. Nous sommes tous blessés et angoissés. Le comique peut, pour de tout petits moments, consoler.

L’Art du rire & L’Art 2 rire, écriture et interprétation Jos Houben, La Scala Paris. Du 11 octobre au 27 décembre.

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