roomPour rendre la séance de Room  la plus intense possible, il ne faudrait rien en dire. Ne pas pitcher le film. Seulement susciter l’envie en expliquant qu’il s’agit d’une histoire carcérale et d’amour filial entre un marmot et sa mère, d’un thriller claustrophobe et d’un mélo familial larmoyant. Au cours de la première partie, nous découvrons un cachot sordide avec les yeux d’un tout jeune enfant. Le cinéaste irlandais Lenny Abrahamson, réalisateur du déjà remarqué (notamment dans ces colonnes) Frank , parvient à donner une dimension surréelle à cette pièce poisseuse. Par d’ingénieux changements de cadre, il l’élargit, triche avec les volumes. Cette cage à lapins se transforme en réservoir à fantasmes. Dans la seconde partie, celle de la libération, il réussit par des plans aériens à restituer l’étrangeté du monde social. Entre les deux, Abrahamson fabrique une séquence à suspense, aussi vigoureuse qu’éprouvante. Bref, Room  vaut mieux qu’une simple adaptation de luxe d’un bestseller (de la romancière Emma Donoghue), mieux qu’une simple machine à Oscars (quatre nominations parmi les plus prestigieuses), c’est d’abord le véhicule idéal pour permettre à son talentueux réalisateur irlandais de devenir enfin un auteur à Hollywood.