mission teensDans son nouveau travail mixant le documentaire et l’animation digitale, la jeune réalisatrice marocaine, déjà exposée dans les plus prestigieuses institutions d’art contemporain à l’instar du MoMA, de la Fondation Cartier et du Centre Pompidou, réfléchit à de graves problèmes socioculturels à travers la comédie.En développant son programme de soutien à la jeune création Open Space, la Fondation Louis Vuitton invite l’artiste marocaine Meriem Bennani à présenter dans ses locaux la vidéo Mission Teens, tournée il y a quelques mois à la commande du Whitney Museum of American Art. “Inspiré des films pour adolescents, des émissions de télé-réalité et des web séries, ce docu-fiction suit, à différents moments de leur quotidien, un groupe d’élèves du lycée français de Rabat”, racontent les commissaires de l’exposition Ludovic Delalande et Claire Staebler. Dans la continuité de ses vidéos The Fly (2016) et Party on CAPS (2018), dédiées à la culture de la fête au Maroc, dans Mission Teens, Bennani est incarnée sur l’écran par un alter-ego animal : précédemment c’était une mouche, et cette fois – une ânesse. Déguisée ainsi, l’artiste observe et interviewe, dans les salles de cours et les maisons privées rappelant le palais d’Aladdin, les élèves de l’école la plus prestigieuse du Maroc. “J’adore des jeux vidéo”, déclare un garçon âgé de 10-12 ans. “Je veux devenir chanteuse vedette”, confesse sa camarade de classe. Habillés en vêtements de luxe, iPhone à la main et écouteurs dorés aux oreilles, ces cool kids occidentalisés ont du mal à répondre aux questions les plus basiques sur l’histoire et la culture de leur pays, posées entre temps par l’artiste. Ils parlent français mieux qu’arabe… mais restent, néanmoins, très « marocains » – Bennani, vivant depuis deux décennies entre Paris et New York, a consciemment inclu dans le film certaines moments en coulisse, où ses petits héros pétulants réadoptent une culture plus “marocaine”. Ceci redonne à Mission Teens, oeuvre apparemment comique et légère, une seconde couche de sens, évoquant les problèmes d’identité, de la persistance du caractère national et d’influence du système scolaire européen sur les jeunes gens grandissant dans un environnement multiculturel. Les problèmes, au sujet desquels Meriem Bennani, elle-même ancienne élève du lycée de Rabat, n’est pas encore en mesure de formuler sa position définitive.

L’exposition «Mission Teens» de Meriem Bennani est visible à la Fondation Louis Vuitton (8 Avenue du Mahatma Gandhi, 75116 Paris) jusqu’au 27 janvier 2020.