bienheureuxUne nuit, à Alger la blanche, quelques temps après la guerre civile. Amal et Samir fêtent leur anniversaire de mariage mais le coeur n’y est pas. Pas moyen de trouver de la gnôle. Pas moyen de trouver une place en terrasse. Pas moyen non plus d’échapper au sujet de conversation qui sème la discorde dans leur couple, jusqu’à le fissurer : devons-nous rester ou fuir le pays ? Pendant ce temps-là, leur fils et ses copains dérivent dans la ville, goûtent à ses transgressions. Drogues, tatouages, musiques interdites, flirts avec de jolies filles non mariées. Joyeux hédonisme arabe ? Pas du tout. Les flics sont partout, les fanatiques et les délateurs aussi. Alors, là non plus, le coeur n’y est pas vraiment. On l’a compris : le portrait que, pour son premier long-métrage, Sofia Djama brosse de son pays est sombre, très sombre. Toutefois elle ne se complaît ni dans un défaitisme plombé ni dans une lucidité glaçante et surplombante. Pas trace non plus ici de vain didactisme. Au contraire, un peu comme le faisait déjà la Marocaine Leila Kitani dans Sur la planche, la jeune réalisatrice algérienne trouve dans la noirceur la matière à une énergie follement moderne : celle du désespoir. Tout en changements de rythmes et de tons, l’ensemble dégage une formidable vitalité. Oui, le désespoir aussi est une révolte.