Quel lecteur n’est pas en deuil de tous les livres non écrits qui auraient fait sa joie ? Quel auteur ne tient pas le catalogue mental des oeuvres qu’il aurait pu écrire mais demeurent projets ? Jean-Benoît Puech dresse un inventaire ludique de quelques ouvrages imaginaires dont il livre résumés et analyses. Neuf récits parmi lesquels un récit historique sur fond de chouannerie, un roman d’anticipation avant gardiste…
Des fantômes de chefs-d’oeuvre
Jean-Benoît Puech flirte avec l’idée du canular littéraire. L’un de ses auteurs fictifs s’appelle McPerson – nom où l’on est tenté de trouver un écho du nom de James Macpherson, poète romantique qui écrivit les poèmes d’Ossian et les présenta comme la traduction des vers d’un barde du IIIe siècle… Jean-Benoît Puech va jusqu’à clore l’exercice par une confession du narrateur en faussaire. L’humour, ici, est un art d’interroger l’oubli. Dans ces récits, il est beaucoup question de fantômes. Ce n’est pas un hasard s’il invente un récit d’Henry James, l ‘auteur du Tour d’écrou, l’un des sommets du genre. Ailleurs, il cite Sandra (Visconti), Laura (Preminger), et L’Aventure de madame Muir (Mankiewicz), trois chefs-d’oeuvre du film de revenants, au sens large. La narration par séquences, elliptique et vive, favorise ce retour du refoulé.
Un étrange désenchantement, nimbé d’ironie, plane sur le livre. Quelques grands motifs reviennent de récit en récit : l’infidélité d’une femme, la déloyauté d’un ami, le roman d’une désillusion politique au miroir d’un temps de crise. L’Histoire, y compris littéraire, est aussi la somme des directions qu’elle n’a pas prises.
« L’oubli n’est pas plus sûr que la mémoire, et le meilleur moyen de détruire se tient plutôt dans la reconstruction. »