Également poète et écrivain, le journaliste d’origine syrienne Omar Youssef Souleimane a quitté la dictature de Bachar el-Assad en guerre pour rejoindre la France en 2012, pays des Lumières, de la laïcité et de la liberté d’expression. Infiltré dans les manifestations de La France Insoumise (LFI), il y découvre l’attelage baroque et contre-nature que ses élus constituent avec des membres d’associations islamistes. Leurs discours séparatistes jouent sur la mémoire coloniale pour culpabiliser et mobiliser une partie de la jeunesse et créer les conditions d’un affrontement social, préalable à leur conquête du pouvoir.
Le cri d’alerte d’Omar Youssef Souleimane montre que la lutte contre cette remise en cause de la laïcité et de l’universalisme républicain représente aussi une protection pour les musulmans de France, pris en otage par ces islamistes qui prétendent parler en leurs noms.
Pourquoi dites-vous que La France Insoumise (LFI) est un Cheval de Troie pour les partis et associations islamistes ?
Parce que ces partis islamistes se développent de la même manière que les Frères musulmans se sont développés depuis toujours. En maniant tout autant la dissimulation que l’usage d’une rhétorique brillante, captivante et opportuniste. Ils s’associent et utilisent d’autres partis, d’autres mouvements pour grandir dans l’ombre. Ils se cachent derrière des politicienspour acquérir patiemment une position de pouvoir. En Égypte, les Frères musulmans ont bien caché leur jeu à la suite de la révolution de 2011, dans la période qui les a vus accéder à une certaine forme de reconnaissance et de pouvoir, à l’époque de l’islamiste Morsi, après la chute de Moubarak et avant la reprise en main par les militaires de Al-Sissi.
J’ai écrit ce livre parce que je viens de ce monde, du Moyen-Orient. J’ai passé les 25 premières années de ma vie entre la Syrie et l’Arabie Saoudite ; j’ai étudié 3 ans dans une école coranique. La France a toujours été pour moi le pays de la laïcité, de Jean-Jaurès, de la gauche, du socialisme…
C’est ce qui m’a toujours étonné après avoir fui la Syrie pour échapper au régime dictatorial de Bachar el-Assad, quand je me suis réfugié en France en 2012. Ici, j’ai découvert avec stupeur ces liens et ces rapprochements entre une partie de la gauche et les tenants d’un islam politique conservateur, avec les islamistes ! Cela m’a tellement choqué ! Au Moyen-Orient, les religieux, les imams, les Frères musulmans et tous les différents courants islamistes sont toujours les adversaires de la gauche ! Pour les activistes d’un islam politique rigoriste, ce sont les infidèles qui emploient le vocabulaire de la démocratie, du libéralisme politique ou du socialisme. Et à l’opposé, pour la gauche de ces pays, tout ce qui a trait aux enjeux mis en avant par les imams, l’application de la charia ou l’avènement d’un Etat islamique, ce sont des discours de gens arriérés, de terroristes même, ou à tout le moins de traîtres à leur pays, qui font passer la promotion d’un islamisme sans frontière avant la défense de leur pays et de sa population. La découverte sidérante de cette complicité incompréhensible, ici en France, réunissant deux courants politiques qui sont radicalement opposés dans le contexte moyen-oriental, c’est ce qui m’a motivé à écrire ce livre.
D’après vous, le choix « d’investir » la cause palestinienne aurait été fait dans une démarche purement électoraliste par LFI ?
La cause de la Palestine est un outil, un sujet, utilisé par La France Insoumise et par les islamistes pour créer cette complicité entre eux. La meilleure preuve, c’est que Jean-Luc Mélenchon ne s’est jamais intéressé à la question palestinienne avant ces dernières années alors qu’elle a suscitée l’intérêt de nombreux hommes politiques en France depuis des décennies du fait de l’enjeu géopolitique qu’elle représente pour l’équilibre du Moyen-Orient et des crises majeures qu’elle a traversée depuis des lustres ; il n’a jamais participé à la moindre manifestation pour défendre la Palestine avant ces toutes dernières années. Une autre preuve, c’est que le Mélenchon d’hier serait un islamophobe aux yeux du Mélenchon d’aujourd’hui. En 2015, il déclarait : « Je conteste le terme d’islamophobie. On a le droit de ne pas aimer l’islam comme on peut ne pas aimer le catholicisme ».
Il disait alors que le voile est un signe religieux qui ne concerne pas la politique de la France, insistant sur l’importance de respecter avant tout la laïcité républicaine, qui doit primer sur le fait religieux, sujet qu’il dédaignait logiquement ou qu’il repoussait dans la sphère privée, en homme politique laïc installé à l’extrême gauche, qu’il était alors, plus classiquement.
La politique de Jean-Luc Mélenchon est actuellement la suivante : diviser pour mieux régner, cliver pour dominer, afin d’accéder au pouvoir. Et je pense que c’est un projet extrêmement dangereux pour la France. LFI sait très bien ce qu’elle fait et ses députés ne sont pas ignorants des conséquences de leurs initiatives, malgré des prises de position qui peuvent parfois paraitre brouillonnes. Certaines de leurs déclarations ou actions sont volontairement spontanées et un peu débridées pour marquer les esprits, comme si l’enthousiasme pour la cause expliquaient une spontanéité mal contrôlée. Une fois qu’on a capté l’attention et marqué les esprits.
Dans les manifestations – et j’y suis allé des dizaines de fois en 2024 et 2025 – on voit très clairement que ce ne sont pas seulement des islamistes ou des imams radicaux qui déambulent à côté des membres de LFI. Ils sont aussi amis, avec le même réflexe de se présenter en tant que victimes quand ils parlent de la Palestine ou de Gaza. Cela m’a fait penser à la démarche récurrente des Frères musulmans qui ont toujours employé un discours victimaire, ce que j’évoque aussi dans le livre. Les Frères musulmans sont nés grâce à ce type de discours victimaires dans les années 1920 à la suite de la chute de l’empire ottoman. Leurs objectifs étaient de reconstruire, de rebâtir le califat ottoman.
Dans ces manifestations, on croise Urgence Palestine, dont le fondateur a tenu des propos qu’on pourrait qualifier d’antisémites, Omar Alsoumi. C’était ostensiblement un ami proche de certains députés LFI. Tous ont un objectif politique en commun. Les islamistes ont pour objectif de disséminer une identité islamique en France, et d’ancrer une reconnaissance de leurs idées auprès des musulmans, qui sont plusieurs millions en France. Ils veulent faire de ces musulmans une communauté identitaire pour troubler la France et mener à bien leurs objectifs politiques et religieux.
Pour LFI, il s’agit de profiter des musulmans de France, et de faire peur aux autres, les « Français », en oubliant malheureusement que la majorité de ces musulmans sont tout aussi Français. C’est ça qui est dangereux dans ce discours séparatiste.
On voit très clairement que l’objectif de LFI n’est pas du tout la Palestine, ni les victimes de Gaza. Ils ont trouvé un sujet sur lequel jouer pour arriver au pouvoir. La preuve de leur succès, c’est que le nombre de musulmans qui a voté LFI est énorme. Les imams radicaux, dont certains sont interdits d’entrée en France, comme Hani Ramadan, ont appelé à voter LFI. EMF (Etudiants musulmans de France) a appelé à voter LFI. Mohamed Louizi, cadre de cette association décrivait EMF comme « le bras étudiant des Frères musulmans pour faire du prosélytisme dans les facs ». Vincent Souleymane, très actif sur X, a déclaré en 2024 au moment des élections : « Il y a le pire et le moins pire ; c’est un devoir, au nom de la charia, d’éviter le pire au profit du moins pire ». Sébastien Delogu a réagi avec un émoji cœur à une publication d’une page consacrée à Yahia Gouasmi, cette publication ayant soutenu Delogu après qu’il a brandi le drapeau palestinien à l’Assemblé nationale ; Yahia Gouasmi est un islamiste chiite pro-iranien et fondateur de Zahra, une association dissoute pour propagande jihadiste et antisémitisme. Rima Hassan, qui incarne dans son discours la haine de la France, avait commencé par trouver « légitime » le massacre du 7 octobre 2023, avant de prendre part à des manifestations en Jordanie, où les manifestants rendaient hommage à Ismail Haniyeh, l’ancien chef du Hamas.
Il y a donc une complicité toxique pour des raisons électorales. Mais je ne veux pas que la France, pays de Voltaire, de Paul Eluard, de la laïcité, le pays qui m’a adopté après avoir fui les islamistes du Moyen-Orient, soit aussi détruit par ce discours radical.
Les cadres de LFI ont peut-être une stratégie payante électoralement mais c’est tout de même une stratégie dangereuse pour le pays à plus ou moins long terme. Ont-ils conscience de jouer avec le feu ?
De mon point de vue, non. Ce discours vient de Jean-Luc Mélenchon. C’est un ancien trotskyste qui pense le combat politique en termes d’affrontements sociaux. Il a dit dans une manifestation qu’il faut compter sur la jeunesse de la banlieue, des quartiers populaires, pour gagner le combat politique.
Affronter et fracturer pour gagner, c’est sa stratégie. Car ils ne comptent pas sur la France, sa République, son universalisme, sa générosité ; il faut être clivant pour mobiliser.
Pour Mélenchon, en bon trotskyste de formation, « la fin justifie les moyens » (Leur Morale et la nôtre, Léon Trotski, 1938), c’est-à-dire qu’on peut accéder au pouvoir pour appliquer le programme de LFI, quitte à abimer le pays en utilisant les islamistes, tout en stigmatisant les musulmans car on les essentialise ?
Oui, rien n’est plus dangereux pour les musulmans, en France et ailleurs, que ce discours identitaire, car la majorité des musulmans de France ne passe pas son temps à la mosquée. Ils sont avant tout Français dans leurs réflexes, mais aussi dans leur diversité, comme tous les Français. Regrouper ces musulmans avec l’aide d’imams ou d’activistes islamistes autour d’une seule identité – religieuse et conservatrice – c’est la pire des choses qu’on puisse faire, c’est le pire « service » qu’on puisse rendre aux musulmans de France.
Je parle l’arabe et j’ai fait des études sur la langue arabe. Sur al-Jazeera, il est important de noter à quel point ces islamistes et ces chaines islamistes soutiennent LFI ; ses élus y sont vus comme des héros. Sur cette chaîne, Amar Lasfar, ancien chef de MF, Musulmans de France, avait déclaré qu’il fallait « inclure la communauté musulmane de France, qui partage le même destin, le même avenir, et qui aura une influence dans les domaines politique et économique ».
Je suis tombé ici dans la région parisienne sur un livre de Yussuf al-Qaradâwî, le plus grand inspirateur des Frères musulmans. Il y exprime clairement que la laïcité est dangereuse pour les musulmans, et à quel point il est opposé à cette laïcité.
En 2002, dans son émission en arabe sur al-Jazeera, « La Charia et la vie », Yussuf al-Qaradâwî annonçait que « l’islam reviendra triomphant en Europe, mais cette fois pas par l’épée, mais par la prédication et la pensée ».
Je suis toujours surpris de voir l’incohérence de certains imams qui recommandent les écrits et les livres de al-Qaradâwî, de le voir publié et diffusé dans les librairies islamistes à Paris ou ailleurs en France, tout en se disant respectueux des lois de la République, en accord avec la laïcité et pour la démocratie, dans leurs propos diffusés en français.
Cela rappelle la tactique classique des Frères musulmans. Ils peuvent dire qu’ils sont tout à fait en accord avec la République, la Loi de 1905, la laïcité, dans leurs discours en français, et en même temps, dans leurs propos en arabe, ils disent complètement l’inverse. Dans leur pratique de l’islam, ils sont également complétement à l’inverse de leurs déclarations apaisantes en français.
Dans les publications du Centre Européen pour la Fatwa et la Recherche (CEFR), fondé par al-Qaradâwî, certaines fatwas semblent correspondre à la définition des initiatives séparatistes telles que définies et encadrées par la loi française sur le séparatisme de 2021, si on considère leurs positions sur le voile, sur l’identité islamiste, sur la place de la République, de la démocratie, etc.
Je me demande comment on peut faire cohabiter ces deux positions, l’une prônée par un discours neutre et conciliant avec les valeurs européennes, et l’autre beaucoup plus agressif et prosélyte, dans les déclarations en arabe. Encore une fois, c’est exactement la pratique opportuniste, mêlant discours consensuel et dissimulation des Frères musulmans. Ils ont payé au prix fort cette tactique au Moyen-Orient en étant interdits dans la plupart des pays arabes, en Arabie saoudite, en Egypte, en Tunisie, aux Emirats et en Jordanie.
Qu’est-ce qu’on attend, ici en Europe ? je pense qu’il y a une grande naïveté, notamment en France. Les Frères musulmans devraient être considérés comme une association terroriste ; il faut fermer leurs bureaux et interdire leurs activités.
Les cadres de LFI s’interrogent-ils sur l’efficacité de leur stratégie de conquête du pouvoir ?
Comment croire qu’ils n’auraient pas conscience du danger, aussi efficace que soit cette stratégie de conquête politique ? Ils ont des députés, des élus, ce sont des gens éduqués, Jean-Luc Mélenchon est un homme d’expérience, il sait ce qu’il fait : diviser pour dominer, pour mieux régner, c’est ça l’objectif. Et en 2017, il a failli gagner les élections présidentielles.
C’est mon analyse : pour lui, profiter de l’existence des musulmans de France, du vote des musulmans doit lui permettre de franchir la dernière marche, de gagner les dernières voix qui lui manquent pour arriver au pouvoir. Mais ce qu’il fait, alors qu’il est en déclin dans les sondages et aux dernières élections nationales, les Français n’en sont pas dupes. Ma responsabilité et la responsabilité de ceux qui parlent en public, et surtout de ceux qui viennent comme moi du Moyen-Orient et du monde arabe et musulman, c’est d’éclairer le débat parce qu’on a vécu cette expérience avec les islamistes, éclairer cette complicité invraisemblable entre les imams radicaux et LFI.
Il y a peut-être des questionnements en privé, en interne, mais les élus LFI qui se sont interrogés sur cette démarche avec les islamistes qui remet en cause les fondements de la laïcité, ont démissionné ou ont été purgés. Et d’ailleurs peu importe ces défections, le discours n’a pas changé et la ligne de LFI n’a pas été modifiée. Je réponds aussi à ceux qui nous accusent – nous qui venons du monde arabe – d’être récupérés par l’extrême à droite, face à ces types d’extrême gauche ou d’ailleurs qui me disent via les réseaux sociaux que je suis « l’Arabe de service ». On n’est pas les « Arabes de service ». Moi, je viens de la gauche, je viens de ce monde, du socialisme et je pense que la vraie gauche doit dénoncer ce que j’appelle la « gauche halal », ces types de LFI qui sont complices avec ces islamistes sans la moindre réserve. Ils ont tout simplement trahi leurs principes.
Vous dénoncez « l’odieux paternalisme de l’essentialisme » qui assignerait des individus pourtant différents, à des opinons, à des communautés figées. Comment l’avez-vous vécu ?
Quand j’étais infiltré dans leurs manifestations, les militants de LFI m’adoraient, j’étais leur « chouchou », parce que j’étais un Arabe, avec un accent, le petit migrant, ce qui était ridicule car je ne suis pas un migrant, je suis Français ! Quand on traite quelqu’un selon la couleur de sa peau, selon son origine, ou pour le faire taire ou qu’on essaie de le faire taire quand on n’est pas d’accord avec lui, il n’y a pas d’autres mots pour décrire cette situation que le racisme. Si la gauche veut l’égalité avant tout, où est légalité dans un tel discours, celui diffusé par LFI ?
Vous parlez aussi du misérabilisme dès qu’il s’agit d’évoquer un individu d’origine étrangère, comme d’une autre forme de racisme. Pourquoi cette forme de racisme s’est-elle développée surtout depuis 2021 ?
Il y a depuis 25 ans le développement de cette forme de raisonnement identitaire. Qui a beaucoup augmenté à la suite des attentats du 11 septembre 2001 partout en Occident. Des voix dans une partie de la gauche française appelaient déjà à profiter ou disons à avoir des liens avec les islamistes. Mais cela est longtemps resté distant. Je pense que cela a beaucoup augmenté à la suite de l’application de la loi contre le séparatisme en 2021 car les islamistes ont alors perdu comme outil de diffusion de leur pensée, les dizaines d’associations et de mosquées radicales présentes en France. Des associations ont été dissoutes et ces islamistes ont perdu du jour au lendemain cette légitimité qu’ils avaient de pouvoir créer un mouvement politique légal qui porterait pour l’avenir leur discours. C’est aussi la raison pour laquelle j’emploie l’expression de Cheval de Troie pour caractériser LFI, car ces islamistes utilisent désormais l’extrême gauche comme un véhicule légal bien pratique pour en tirer des avantages politiques.
Le paradoxe de cette loi contre le séparatisme, ça serait donc de voir que les islamistes, qui ne peuvent plus être officiellement représentés politiquement par un parti ou par une association islamique, vont négocier avec LFI pour voir leurs idées défendues par ce mouvement ?
Oui, tout à fait. Juste avant les législatives de 2024, LFI a proposé la candidature de Mohamed Awad. Ce dernier a été un des responsables de l’association Jeunes Musulmans de France, et c’est un proche de Hassan Iquioussen, imam accusé de faire l’apologie du terrorisme.
Le conseiller de Louis Boyard, Ismaeel El-Hajri, était un soutien engagé pour Baraka City, association islamiste, dissoute par le ministère de l’Intérieur. Cette liaison, ce n’est pas seulement avec des mots mais aussi avec des pratiques ; on voit des islamistes qui sont en train de se rapprocher, on parle de projets en commun. Thomas Portes qui veut développer un projet avec un militant proche du Hamas. Le garde du corps de Rima Hassan est également militant à Urgence Palestine, association islamiste et antisémite, etc.
LFI a reflué aux dernières élections. Ces islamistes sauront ils être patients et attendre des jours meilleurs pour LFI ou iront-ils chercher ailleurs un autre support de leur développement ?
J’ai fait ce livre car je me pose des questions, je pose des questions aux électeurs, à l’Histoire, aux Français, pour comprendre d’où vient ce phénomène. Je m’exprime à travers ce que je vois, ce que je constate. À travers ce que j’ai étudié de l’islam radical ou de l’islamisme au Moyen-Orient. C’est aux autorités d’ouvrir les yeux car elles ont un rôle à jouer également, car je ne suis pas un homme politique. Il faut toujours être très vigilant, très prudent avec les islamistes, analyser leur discours, expliquer leurs projets, poser des questions à LFI sur cette complicité avant qu’il ne soit trop tard.
Peut-on rendre facilement audible la dénonciation argumentée et raisonnée que vous faites dans votre livre des islamistes et de leurs complices à l’Assemblée nationale quand, en France, le regard critique public sur le monde musulman – au sens le plus large – est presque toujours le fait de l’extrême-droite, et de son discours outrancier, excessif et caricatural ?
Je comprends ce que vous voulez dire. Mais moi, je pose aussi la question à la gauche : pourquoi avez-vous laissé à cette droite là le terrain de la discussion, du débat, et le champ libre pour dénoncer les islamistes ? Il faut que nous soyons loyaux à nos propres principes, à ceux de la République, de la laïcité. Nous devons être fidèles aux valeurs de cette République de France, universaliste et non identitaire.
LFI et les islamistes ont réussi à populariser cet amalgame qui consiste à faire comme si la critique et la dénonciation des intégristes d’une religion, revenait à mettre en cause cette religion, et plus largement les migrants, les immigrés, qu’ils soient d’ailleurs musulmans ou non …
C’est complétement ridicule, cet amalgame, regardez combien d’immigrés en France sont d’origine musulmane mais ne parlent même pas l’arabe ou n’ont jamais lu le Coran, ou en savent si peu de l’islam. Ces simplifications, ces raccourcis sont délétères car il est dangereux d’associer une religion à une identité, une religion à une population, à une migration, une religion à une histoire coloniale. Il faut vraiment savoir séparer ces éléments sans préjugés faciles et bien pratiques si on veut essayer de comprendre sereinement les choses. La bonne nouvelle, c’est que nous sommes nombreux à partager cet idéal républicain universaliste, alors que les tenants du communautarisme sont une minorité aujourd’hui. Mais une minorité agissante, qu’il faut combattre chaque jour, avec la plus grande énergie, sans ambigüité, sans relâche.
Les Complices du mal, de Omar Youssef Souleimane, Plon, 208 pages, 21 euros, sortie le 2 octobre 2025