Nouveau parcours du Musée de la Musique qui permet au public de redécouvrir la superbe collection d’instruments de la Philharmonie, avec près de 9000 objets.
En cette année qui marque tout à la fois le 30ème anniversaire de la Cité de la Musique et le 10ème de la Philharmonie de Paris, il convient de rappeler à quel point ce magnifique lieu du Parc de la Villette, si décrié à ses débuts, illustre aujourd’hui à la perfection ce qu’est réellement l’« exception culturelle française ». Dans un quartier (encore) populaire de l’est-parisien est né un lieu dédié à la musique et à son histoire qui attire aujourd’hui des publics divers et variés. Ce pari audacieux, cette réussite éclatante- alors que la majorité des « mélomanes » de l’ouest parisien pariaient sur un échec retentissant, rappelle que la plupart des grands monuments et institutions culturelles de Paris (de la Tour Eiffel au Musée d’Orsay) sont des acquis arrachés de haute lutte par le camp progressiste face aux puissants conservatismes institutionnels et politiques.
Comment protéger ces acquis précieux sans sombrer dans une autre forme de « conservatisme » ? La Cité de la Musique semble avoir trouvé la bonne formule : être à l’écoute du monde et des grandes évolutions sociétales. Conjuguer au présent toutes les époques et tous les univers.
On parle souvent des grandes expositions de la Cité de la Musique. Actuellement, on peut voir « Ravel, Boléro ». Si certaines grandes expositions sont plus réussies que d’autres, (on a beaucoup aimé « Disco, I’m Coming Out », « Jamaica, Jamaica » sur le Reggae, « Fela Anikulapo-Kuti – Rébellion afrobeat », on ne ressort jamais totalement déçu, à l’exception peut-être de celle consacrée aux Musiques Arabes).
Mais il y a aussi l’exposition permanente de la collection du Musée ( près de 9 000 instruments et œuvres d’art), avec un nouveau parcours à l’occasion des 30 ans de la Cité de la musique. Affirmer que l’exposition permanente est la véritable vitrine du Musée n’est pas seulement un jeu de mots, tant elle résume parfaitement, par sa scénographie et ses cartels, les partis pris progressistes de ce lieu consacré à l’histoire de la musique. Plutôt que de privilégier les classifications géographiques et ethnographiques, ce nouveau dispositif met en évidence les dynamiques d’échanges entre les cultures, ce n’est pas l’histoire des instruments de musique qui prime dans cette nouvelle configuration, mais plutôt l’histoire du monde racontée par les instruments de musiques, et ça change tout. Cette passionnante lecture transculturelle de l’histoire des instruments de musique et de leurs évolutions aborde toutes les époques, de la fin du XVIe siècle à nos jours, sans faire l’impasse sur l’esclavage et la délicate question de la restitution des biens et des récits culturels, ni sur les épopées coloniales.
Des tableaux du Louvre, des pièces rares du Quai Branly ou du musée Guimet, et des oeuvres d’artistes contemporains commandés par la Cité de la Musique viennent appuyer cette nouvelle et passionnante histoire de toutes les musiques du monde. Du banjo qui connecte l’Afrique aux Amériques, aux majestueux pianos aux formes diverses et variées utilisés par différentes cultures mondiales, des plus belles guitares du monde aux plus précieux des violons, de l’épopée du Oud de Turin au Caire. La grande qualité de ce nouveau parcours ( des pièces sans âge jusqu’au studio de Pierre Henri) est de ne pas céder à la tentation -fétichiste- d’exposer des instruments ayant appartenu à des grands maîtres de la musique, même s’il y’en a, pour préférer composer avec les instruments de toutes les époques, la symphonie de toutes les musiques du monde, enfin reconnectées entre elles.
Collection Permanente, Musée de la Musique de la Philharmonie, jusqu’au 31 août.