Léa Desandre présente un pétillant spectacle autour de Julie Andrews et la comédie musicale à l’opéra de Rouen. L’occasion de revenir sur l’irrésistible ascension de cette jeune mezzo-soprano.

À 30 ans, Léa Desandre possède déjà un recul très réfléchi sur son parcours riche en expériences. La jeune mezzo-soprano assume ainsi sans emballement sa vie d’artiste très sollicitée. « La tenue d’une carrière, c’est un travail méticuleux. Mon rêve est de continuer à chanter longtemps, il me faut donc réfléchir à l’évolution de ma voix, ne pas faire des rôles trop lourds trop tôt, sinon je mettrais un poids sur mon instrument. Les cordes vocales sont une matière flexible, si on tire trop fort sur ce tissu, on le distend. Or je souhaite conserver de la souplesse et de la flexibilité ». Férue de danse classique, la jeune franco-italienne – mère française exploitante de cinéma en Aquitaine, père italien distributeur de films – rejoint le Chœur de l’Opéra de Paris à 12 ans. Elle tombe un jour en pamoison devant la soprano Natalie Dessay qu’elle voit à la télévision, ce qui décide de sa vocation. « Elle chantait et dansait, c’est exactement ce que je voulais faire ». Après des études au Conservatoire de Boulogne-Billancourt, elle part étudier à Venise auprès de la contralto Sara Mingardo. « J’avais besoin de travailler avec une personnalité qui m’inspire, qui connaisse la scène, la technique, sache constituer un répertoire. » Puis la jeune fille intègre le Jardin des Voix de William Christie, ce qui lui offre la possibilité de faire des tournées. « J’y ai appris à gérer les voyages, la discipline de vie, le repos, l’hydratation. Les changements de climats qui jouent sur la voix… Après une année de tournées, on connaît vraiment le métier de chanteur. » Léa Desandre fait ses débuts avec le rôle-titre d’Alcione de Marin Marais à l’Opéra Comique en 2017. « J’étais inconsciente, le cœur rempli de joie par cette musique sublime. Mais cette forme d’insouciance participe à ce que l’on peut donner artistiquement. Depuis, je me suis construite techniquement, car il faut des années pour que le corps et l’instrument ait fini de muer, que tout se pose – les femmes mettant beaucoup plus de temps à muer. J’aborderai aujourd’hui ce personnage différemment, mais à ce moment-là ma fraicheur correspondait au rôle créé en 1706 ». Depuis, elle a confirmé tout le potentiel de sa voix ronde et colorée au timbre soyeux, de sa présence scénique primesautière et protéiforme. Après avoir incarné Chérubin des Noces de Figaro une dizaine de fois, dont l’an dernier à Garnier, Léa Desandre continue d’investir Mozart en 2024 dans Idoménée à Genève en février, avant de chanter le rôle-titre de Médée de Charpentier à l’Opéra de Paris en avril, puis deux spectacles au festival d’Aix-en-Provence en juillet. En attendant, elle est à Rouen ce mois-ci pour Chasing Rainbows, pétulant spectacle autour des chansons de Julie Andrews et la comédie musicale de Broadway, avec l’Ensemble Jupiter dirigé par Thomas Dunford. « Cet univers nous tenait vraiment à cœur, à Thomas et moi. C’est le plus important, car lorsque nous faisons des projets ensemble, nous tenons à ce qu’ils soient portés par une passion commune que nous puissions transmettre au public. »

Chasing rainbows, songs of Julie Andrews, Léa Desandre & l’Ensemble Jupiter, direction musicale Thomas Dunford, Opéra de Rouen, Théâtre des Arts, 22 et 23 décembre, plus d’informations