L’expo Bollywood Superstars. Histoire d’un cinéma indien au Quai Branly revient sur un cinéma un peu snobé, et qui se révèle finalement très riche.
Le musée du Quai Branly s’habille de sari en or fin et de mille feux pour inviter le public français à découvrir sous toutes ses coutures le cinéma indien et son histoire. D’ailleurs, le singulier ne convient guère en la matière puisqu’il existe une pluralité de cinémas en Inde. Le parcours proposé retrace plus d’un siècle de cinéma indien, égrenant ses sources artistiques (poésie, théâtre d’ombres ou encore lanterne magique), ses personnages issus des grandes épopées (Ramayana et Mahabharata) qui ont nourri ces cinématographies. Il s’achève sur des icônes – les superstars indiennes – sans oublier d’offrir un écrin au plus célèbre des cinéastes hindis Satyajit Ray. Dans cette industrie de masse, le pays cherche des valeurs unificatrices à travers des esthétiques marquées par la couleur, la danse et la flamboyance. Il s’agit de fuir les clivages et aussi de remettre en question le système des castes derrière ces explosions visuelles (comme dans le célèbre Devdas de Sanjay Leela Bhansali, 2002). Les commissaires de l’exposition, Julien Rousseau et Hélène Kessous, insistent sur le fait que « pour aimer Bollywood » il est nécessaire d’apprendre une nouvelle langue cinématographique. Sans nul doute et il est surtout important de faire fi des a priori et stéréotypes auxquels on accole bien souvent ce cinéma que l’on juge univoque. L’exposition vise donc à nous faire toucher du doigt la diversité d’un art cinématographique qui a su emprunter à la tradition, aux mythes comme aux héros divins afin de construire ses nouvelles divinités sur écran. Bollywood Superstars révèle les premiers films muets, remonte aux origines d’un cinéma qui déborde la frontière des genres mêlant romance, action, combats, danses, western, et qui sait se décliner en films d’auteur comme en blockbusters. L’âge d’or du cinéma Mumbai (de Bombay), dans les années 1940-1960, permet l’avènement de l’acteur star capable de tourner un film le matin, un l’après-midi et un le soir, selon la rumeur. Le terme « Bollywood », lui, est forgé par un journaliste indien témoignant que l’industrie cinématographique à Bombay rivalise désormais en quantité et qualité avec les studios hollywoodiens. Et l’égide d’Hollywood n’est jamais loin comme le pointe la carte de l’Inde montrant tous les Bollywood (hindi), Kollywood (tamoul), Tollywood (telougou), etc. Par ailleurs, si l’esthétique de ces cinémas doit tout ou presque à la tradition, il ne faut pas oublier ce que son faste et ses danses empruntent également beaucoup aux génies hollywoodiens de la comédie musicale : Busby Berkeley en tête avec ses rondes enfiévrées de danseurs et danseuses, ses kaléidoscopes et ses plans zénithaux. L’exposition rappelle enfin qu’avec plus de 1500 films produits par an, dont une bonne partie exportée sur tous les continents, l’Inde est actuellement le premier producteur de cinéma mondial. Une exposition à ne pas manquer !
Bollywood Superstars. Histoire d’un cinéma indien, exposition temporaire au Musée du Quai Branly-Jacques Chirac, jusqu’au 14 janvier 2024.