Un petit bijou de comédie pour petits et grands au Studio de la Comédie-Française, Le Chien de Marcel Aymé, servi par des acteurs en verve. 

On oublie à quel point Marcel Aymé nous a offert parmi les plus beaux contes de notre époque. La manière qu’il a eu de ramener vers le XXe siècle, des thèmes, des figures, des situations qui pourraient être ceux de La Fontaine ou d’Esope. Les animaux y parlent et y pensent, parfois mieux que les hommes. L’idée donc de faire vivre au théâtre les Contes du Chat perché, est aussi revigorante que nécessaire. Et l’on se réjouit que la Comédie Française poursuive ses pièces consacrées aux contes, en s’adressant aussi bien aux enfants, qu’aux adultes. Cette fois-ci, Véronique Vella et Raphaëlle Saudinos nous mènent sur les traces du « Chien », l’un des personnages les plus émouvants. La scénographie d’Eric Ruf joue bien sûr sur le conte, un paysage rural nous est donné en arrière-fond, mais aussi sur un théâtre comique, puisque tout est mis en place, la batterie, la paille, les costumes, pour servir le burlesque du jeu des acteurs. Et ils s’amusent drôlement, jouant avec un plaisir qui très vite contamine toute la salle. Par qui commencer dans cette petite troupe qui semble au studio de la Comédie Française comme en récréation de Richelieu ? Saluons d’abord la performance de Nicolas Lormeau, le « chien sans nom », brave bête aveugle recueilli par Delphine et Marinette. L’acteur le joue aussi bourru, moribond dans un premier temps, que joyeux et énergique dans un second. Sa métamorphose au cours de la pièce, que Lormeau mène avec finesse, nous raconte la morale de cette histoire d’un chien trop bon, fidèle à l’excès. Autour de lui, les filles, Florence Viala et Elsa Lepoivre s’amusent en adolescentes, à mi-chemin de la candeur et de la brutalité propre à leurs âges. Et puis il y le chat, matou ingrat et fuyant, à qui Jean Chevalier donne une touche d’acteur français de l’entre-deux-guerres, s’amusant à se faire le parigo à la Gabin de cette bucolique. Et puis en arrière-fond, la batterie de Yoann Gasiorowksi donne la vitesse de l’ensemble- car cette pièce, comme toute comédie, et particulièrement lorsqu’elle s’adresse aux enfants, se fonde sur un rythme endiablé. Gasiorowski que l’on retrouve à la fin, dans une simple scène, qui jette la cruauté dans ce monde somme toute bien innocent. Oui, c’est un conte qui finit mal, et pourtant, rien n’entame la joie de cette petite folie qui finit acclamée par le public, petits et grands réunis autour du chien d’Aymé, et ses amis. 

Le Chien de Marcel Aymé, mise en scène Raphaëlle Saudinos et Véronique Vella, Comédie-Française Studio, jusqu’au 7 mai.