Nicolas Pariser avec Le Parfum vert, signe une comédie de très haut niveau, et très politique. À ne pas manquer.

La comédie française se porte bien ces derniers temps surtout lorsqu’elle lorgne du côté du film noir. Nicolas Pariser s’essaie au genre avec une gourmandise communicative. En bon hitchcockien, il ouvre son Parfum vert sur le chignon d’une blonde vêtue de cuir que l’on suit dans une loge de la Comédie-Française où elle subtilise un poudrier avant de révéler sa longue chevelure rousse. Un faux chignon dévoilé, l’art du faux-semblant, les chausse-trappes et les pièges donnent le ton. Un acteur meurt sur scène empoisonné en livrant ces derniers mots dans un souffle : « le parfum vert ». Martin (Vincent Lacoste) recueille le message avant de se voir embarqué dans un imbroglio loufoque et enthousiasmant qui le conduit dans la riche demeure d’un collectionneur de dessins originaux à Rambouillet, puis en Belgique à Bruxelles sur les traces d’un illustre dessinateur en passe d’être assassiné avant d’atterrir dans une salle de spectacle en Tchéquie. Faux coupable, meurtres en cascades, course-poursuite, masques, codes à déchiffrer au théâtre, partition à l’appui, les indices hitchcockiens jalonnent le parcours même si Pariser flirte davantage du côté de la comédie classieuse à la Stanley Donen façon Charade. Le générique annonce d’ailleurs la couleur avec un graphisme digne de Saul et Helen Bass dans le plus pur style Arabesque. Les comédiens virevoltent de concert sous l’œil d’un cinéaste plus que jamais complice. En route, Martin fait une crise d’angoisse lorsque le train s’arrête à la gare de Nuremberg, la comédie change son aiguillage et prend un virage politique. L’Anthracite est un McGuffin à peine déguisé. Racine et son Illusion comiquedeviennent prétexte à révélations empoisonnées, décryptées par Claire (Sandrine Kiberlain), une autrice de bande dessinée sans public, ashkénaze paranoïaque (serait-ce un pléonasme ?), qui s’est laissée embarquer dans la folle équipée de Martin sous le prétexte qu’elle préfère marcher plutôt qu’attendre des fans qui ne viendront pas. Les paranoïaques ont prouvé qu’ils pouvaient survivre aux pires tourments historiques, affirme une Claire encombrée d’une mère juive qui l’appelle sans cesse. Une Claire qui vient de quitter Israël par nostalgie de l’Europe. L’Europe, le mot est lâché, derrière la comédie virtuose et légère se cache une vision politique désenchantée. Le cinéaste revendique sa plongée dans Tintin et le Hitchcock d’Une femme disparaît : « Ce sont deux œuvres qui révèlent une véritable inquiétude quant à la marche du monde, une angoisse liée aux événements européens. » Et si dans ce Parfum vert les références abondent, elles nourrissent surtout une œuvre qui avance en questionnant sans cesse les codes, les repères, les images connues, en cherchant à lever le rideau sur les turpitudes du monde. Après Le Grand Jeu autour de l’affaire Coupat et Alice et Monsieur le Maire, Pariser prouve une nouvelle fois qu’il est un réalisateur d’envergure, à suivre absolument.

Le Parfum vert de Nicolas Pariser, avec Sandrine Kiberlain et Vincent Lacoste, Diaphana Distribution, sortie le  21 décembre 

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