Petit délice des débuts de la science-fiction sur grand écran, Le Rayon invisible ressort dans un combo DVD/Blu-ray chez Elephant Films. 

Sorti en 1936, Le Rayon invisible réunit Boris Karloff – qui a notamment donné vie et visage à la créature de Frankenstein (1931), mais aussi à la Momie (1932) – et Béla Lugosi, autre habitué des figures monstrueuses (Draculaen 1931 ou bien The Raven en 1935), dans une des premières incursions du studio hollywoodien Universal dans le genre encore balbutiant de la science-fiction. 

Les premières scènes du Rayon invisible s’appuient d’ailleurs très largement sur l’héritage fantastique des deux acteurs, déployant une esthétique expressionniste du plus bel effet. Éclairé par une lune sinistre et des éclairs surnaturels, coincé entre deux sommets des Carpates, le château baroque occupé par le docteur Janos Rukh (Boris Karloff) aurait pu compter le fantôme de la nuit Nosferatu parmi ses précédents locataires. C’est du moins ce que semblent penser les convives du scientifique, venus s’enquérir d’une de ses découvertes révolutionnaires, en découvrant la matriarche Rukh, vieille femme aveugle et annonciatrice de mauvais augures. 

La mise en scène de Lambert Hillyer, somme toute studieuse et académique, s’ingénie à accompagner les extraordinaires trouvailles du docteur d’une profusion d’effets spéciaux, franchement réussis. En manipulant un imposant télescope, fruit de son génie, Janos Rukh réussit à capter les rayons lumineux de la galaxie d’Andromède, traversant du même coup un paquet d’années-lumière et stupéfiant une assemblée pourtant sceptique. Devant leurs yeux ébahis, les invités découvrent alors le passé de la planète bleue, heurtée par une météorite qui dormirait toujours en secret au cœur du continent africain. Ni une ni deux, une expédition est montée pour retrouver la concrétion extraterrestre. Malgré les avertissements de sa maman, l’expérimentateur se transforme avec enthousiasme en explorateur. 

C’est avec le départ en Afrique que Le Rayon invisible – en même temps qu’il perd de son unité esthétique et livre ses scènes les plus incertaines – se confronte véritablement à son sujet. Exposé à sa découverte, Janos Rukh se voit affligé d’un mal étrange, signe de son destin prométhéen : le savant porteur de lumière et de connaissance devient phosphorescent et radioactif, tuant d’un simple toucher ses congénères. Devenu inhumain, paria d’une société qui ne l’a vraiment jamais reconnu, rongé par la colère et la jalousie, Janos Rukh est le lointain cousin des docteurs Mabuse et Folamour. Certains savoirs doivent-ils rester inconnus de l’humanité, comme le suggère la parabole ? On ne sait pas, mais Le Rayon invisible mérite la (re) découverte. 

Le Rayon invisible de Lambert Hillyer, Elephant films