À la croisée de la danse, du théâtre, des arts plastiques, le Festival de Marseille ouvre une fenêtre sur le monde. D’Éric Minh Cuong Castaing à Granvat, en passant par Fabrizio Cassol, c’est une constellation d’univers très éloignés qui s’est rassemblée pour l’ouverture du festival le weekend dernier. Et qui se poursuivra jusqu’au mois de juillet.

Le soleil ne semble pas vouloir faire de l’ombre aux artistes programmés pour l’ouverture tant attendue du Festival de Marseille, dernière édition imaginée par Jan Goossens. Il y en a pour tous les goûts ; cinémas documentaires, concerts chorégraphiés, invitations au voyage, chaque spectateur peut découvrir d’autres horizons, réveiller sa conscience occidentale quelque peu engourdie.

Première étape, I Silenti. Complice de Platel, le saxophoniste Fabrizio Cassol continue d’explorer la nature humaine, d’aller à la rencontre d’autres mondes, d’autres cultures, d’autres civilisations. Cette fois, épaulé par la metteuse en scène Lisaboa Houbrechts et la chanteuse Tcha Limberger, il s’intéresse au peuple Rom, à son histoire, au silence des survivants du génocide dont ils ont été victimes au cours de la Seconde Guerre mondiale.
S’appuyant sur les Madrigaux de Monteverdi, qu’il mâtine de chants tsiganes, le musicien entraîne les spectateurs dans une balade au cœur de l’âme d’un peuple entre rires et larmes, entre tristesse et joie, entre fureur de vivre et hommage à ceux qui sont morts pour des traditions, pour que demeurent coûte que coûte un idéal, une pensée, un art. Les chants et les lamentos de toute beauté touchent juste, les images violentes de charniers, de camps de concentration glacent. Le temps est suspendu, le moment est au recueillement. Ne manque finalement à ce tableau profondément humain, que la présence unique de la danseuse Shantala Shivalingappa, bloquée en Inde pour des raisons sanitaires.

De son côté, au Ballet national de Marseille, Éric Minh Cuong Castaing propose de redonner un peu de mobilité à ceux qui l’ont perdu. Aidé de trois jeunes artistes, il offre à une ancienne danseuse et à un ancien boxeur la possibilité de remonter sur scène, de bouger, de danser. L’intention est louable, toutefois on a du mal à voir la finalité artistique de cette œuvre déroutante. Seul le sourire qui éclaire les visages des deux interprètes apporte une réponse encourageante .

La nuit tombe, il est temps de lâcher prise, de se laisser porter par le vibe des Belges Granvat. Direction le Mucem, où devant l’ancienne caserne du fort Saint-Jean, une estrade a été montée. Son clubbing à fond les manettes, jeu de lumières pétaradantes, corps en transe de six danseurs, la fête ne fait que commencer. Le concert à cent mille volts ne dure qu’une heure, mais réveille nos corps engourdis par des mois de confinement, par l’envie de liberté, de transpirer sur des rythmes technos. Transperçant la nuit, la magnifique voix de Boule Mpanya emporte nos dernières réticences. Le festival de Marseille a donné le ton. La culture est enfin sortie de sa léthargie. Le monde, toujours distancié n’est plus que fête. Et ça fait un bien fou !
Pour plus d’infos : https://www.festivaldemarseille.com

Jusqu’au 11 juillet, puis du 24 au 29 août.