Rencontre avec Sarah Koné, à la tête de la Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique, que l’on devait retrouver en mai dans Le Voyage dans la Lune d’Offenbach. Alors que le spectacle est reporté en 2021, elle nous raconte ce que la crise a bouleversé dans le travail du chœur d’enfants.
Propos recueillis par Oriane Jeancourt Galignani
Comment avez-vous réagi à l’annonce du confinement ?
Nous étions en train de mener des répétitions pour le Voyage dans la Lune, avec Laurent Pelly. Mais début mars, des enfants de retour d’Italie, d’Asie, ne pouvaient plus participer aux répétitions, nous commencions à être inquiets. La fermeture des écoles a été annoncée, et on a compris. C’était un protocole à mettre en place.
Les choristes ont-ils accepté que ce Voyage dans la Lune soit annulé et reporté à l’année prochaine ?
Ils ont entre dix et vingt-quatre ans. Il y a d’abord eu une incompréhension, ils ont été très déçus de ne pas faire Offenbach. C’était très abstrait comme situation. Les grands qui avaient commencé un travail de fond avec Laurent Pelly ont été les plus inquiets. Les petits sont plutôt anesthésiés par cette durée sans fin.
Le Voyage de la Lune sera reporté au printemps 2021, ce qui est une bonne nouvelle. Mais dans ce report, se jouent tout de même des petits drames, notamment pour les bacheliers, puisque ce devait être leur dernier spectacle : alors même qu’ils sont privés de bac, ils n’ont pas d’opéra non plus ! Il a fallu trouver une autre manière de faire troupe.
Vous meniez aussi un intense recrutement pour la rentrée 2020….
Nous avions vu près de 500 enfants en mars. La Maîtrise a deux voies de recrutement : l’un classique, l’audition, et parallèlement à ça, une tournée de recrutement. Tous les ans, on pose nos valises dans une commune du grand Paris. Cette année, j’ai entendu tous les CM2 des dix écoles d’Ivry, heureusement juste avant le confinement, on en a sélectionné une quarantaine. Et on a réussi à finir cette audition grâce aux outils numériques, et à l’aide des écoles d’Ivry, qui ont filmé les enfants qui n’avaient pas de moyens numériques. Sept de nos recrues de la rentrée viennent d’Ivry, et deux d’entre eux ont été filmés par des enseignants, pendant le confinement. Je ne sais pas comment les remercier.
Quelles sont les conséquences de ne pas chanter pour un choriste ?
C’est dramatique. La voix est un instrument qui se travaille régulièrement. J’espère que les plus grands pourront revenir en juin en répétitions. Pour les plus jeunes, on découvre des adolescents qui ont mué. Les professeurs ont réussi à mettre des méthodes à distance, ils ont même des devoirs de danse ! Il a fallu inventer des idées artistiques pour les maintenir volontaires. On a fait des chœurs à distance, par montage.