lazzaroCannes, Heureux comme Lazzaro a été ovationné par un public ému aux larmes. Cette fable intemporelle débute dans un village retiré où vivent dans des mansardes surpeuplées des paysans pauvres. Village médiéval où l’on vient encore chanter à la belle étoile la sérénade aux jeunes femmes que l’on désire épouser. Village dénommé Inviolata, comme s’il avait été préservé des outrages du temps ; village où l’on cultive le tabac pour le compte de la marquise de la Luna (Nicoletta Braschi). C’est là que déambule parmi les siens le magnifique Lazzaro (Adriano Tardiolo), idiot à la Dostoïevski, garçon trapu, silencieux et naïf et surtout d’une bonté absolue. Tourné en pellicule Super 16 le film a quelque chose d’un arte povera qui serait comme une réminiscence du néo-réalisme spirituel et catholique d’un Vittorio De Sica et notamment de Miracle à Milan. Et d’ailleurs un miracle se produit qui fait se renverser la narration, la propulsant au coeur de la grande ville, des années plus tard, au milieu des bidonvilles. Le monde a changé, ses amis paysans ont vieilli mais Lazzaro, lui, demeure le même. L’un des charmes du cinéma de Rohrwacher tient à sa façon subtile, sans coups de force, de jouer avec le réalisme magique, de prendre des chemins de traverse, de créer des mystères irrésolus tant au niveau de l’image que du récit ; des mystères qui empruntent aux contes médiévaux, aux représentations catholiques et au théâtre classique.