faire la paroleEugène Green a toujours la tête – et la caméra – ailleurs. En l’occurrence au pays basque, où s’enracinait déjà son beau roman ensorcelé, Les Voix de la nuit. Mais on se fourvoierait si on en restait à la surface, si on ne voyait qu’un docu qui suit quatre jeunes gens – et rappelons au passage combien Green filme magnifiquement ces visages au seuil de l’âge adulte – redécouvrant la culture et la langue basque au fil d’un road trip. On se tromperait, car Green donne justement à voir, dans son film, ce qui double cette langue qu’est le basque – cet autre monde qui l’entoure comme un halo. Qu’il s’agisse de l’éclairage presque caravagiste qui nimbe des chanteurs et les baigne d’une grâce transcendantale ; qu’il s’agisse du rappel de l’activisme et de la répression indissociables de l’histoire de la langue ; ou qu’il s’agisse encore de filmer in situ, dans une grotte ou dans l’écrin d’une vallée, d’autres chanteurs, Eugène Green cherche toujours à capter la même chose. A savoir, le paysage – naturel, mystique, ou politique – qui constitue l’arrière-plan de la langue. Son envers.