Emanuel Gat poursuit sa route avec Montpellier Danse, en créant Act II & III or The Unexpected Return of Heaven And Earth.

Un studio de danse est un lieu de paix, un havre de la création, un berceau de l’imagination. Dans sa nouvelle création au titre long de Act II & III or The Unexpected Return of Heaven And Earth, Emanuel Gat n’en fait pas un secret. Il voulait  reconstruire le studio Cunningham sis dans l’Agora, la Cité de la Danse de Montpellier, sur le plateau de l’Opéra Comédie. Jean-Paul Montanari, le directeur de la maison et du festival, rarement réfractaire aux souhaits des artistes – « L’artiste a toujours raison », disait-il un jour – s’en amuse : « On a commencé à chiffrer le budget et les coûts de transport en tournée. C’était faramineux. Donc il n’en a gardé que la lumière ! » La lumière comme thème d’un spectacle, ce n’est pas impossible et parfois un lieu avec ses effets de lumière fournit l’inspiration. On pense à Available Light, pièce mythique de Lucinda Childs, créée avec la lumière disponible dans un entrepôt désaffecté, en 1983, puis transposée sur scène dans des décors signés Frank Gehry. Mais il faut faire avec l’argent disponible, même si la lumière naturelle est gratuite. 

Dans le studio montpelliérain, où Gat a ses habitudes, il a donc observé les rayons du soleil. « La lumière vient soit de Cour, une lumière blanche parce que les murs blancs reflètent la lumière du soleil, soit de Jardin, surtout l’après-midi, et elle est alors dorée », dit le maître des lieux, entendez : Montanari. C’est donc une journée de lumière en accéléré que Gat fait défiler dans cette création, elle-même issue d’un processus fortement dépêché. C’était entre quelques dates de tournée de son spectacle Lovetrain2020, pendant une pause involontaire due aux annulations en raison de la pandémie que la compagnie se trouvait dans le studio. 

Pas étonnant alors que la nouvelle chorégraphie soit directement issue de la précédente, à l’instar des enchaînements de phrases chorégraphiques dans les pièces de groupe de Gat, où tout coule de source, tant les danseurs et leur chorégraphe se connaissent. Ce que Montanari décrit en ces termes : « Les danseurs savent exactement ce qu’Emanuel attend d’eux. Ils ont tout un matériau chorégraphique à leur disposition et lui, il donne des indications. C’est une belle compagnie, ils sont intelligents, ils sont à l’écoute et ils sont avancés car ils connaissent tout son vocabulaire, son histoire. On ressent entre les danseurs une vraie complicité, humain et chorégraphique, car ils se retrouvent tout le temps. » 

Une vraie compagnie donc, avec une vraie identité. Celle-ci, Gat l’a forgée en lui-même, ayant choisi de se détacher artistiquement de ses origines israéliennes. Cela fait longtemps qu’on l’identifie comme un chorégraphe français. Quand il s’installa à Istres, en 2007, suite à l’échec de son projet d’une maison de la danse dans la ville israélienne de Kyriat Gat, faute de financements publics, il parlait avec franchise de la nécessité de s’enfermer dans un studio de danse pour se dégager des tensions dans le monde réel, à l’extérieur, en Israël. Aujourd’hui, il laisse entrer la lumière. La connexion entre le studio et l’extérieur est faite. 

Emanuel Gat. Act II & III or The Unexpected Return of Heaven And Earth. Festival Montpellier Danse. 22 et 23 juin 2022