Une brève et ludique histoire des jeux de construction nous ramène en enfance à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. De 4 à 104 ans !

      Lorsqu’on connaît le chiffre astronomique du marché des jeux vidéo – près de 2,4 milliards d’euros pour la France sur un marché mondial avoisinant les 300 milliards de dollars, récemment dopé par la pandémie et surpassant de loin les industries de la musique et du cinéma confondues – il semble bien vain de se pencher sur la préhistoire des jeux de construction. Rappelez-vous de ces petits cubes de bois emboîtables imitant une maison, des planchettes Kapla s’empilant sans joints de fixation ou des premières briquettes Lego, bien rangées dans leurs emballages de carton jaunis, laissées désormais le plus souvent à l’abandon dans le coin le plus sombre d’une chambre d’ami. Sur les étagères de nos grands-parents, restent ces drôles de lamelles de métal perforées en forme d’équerres, de roues ou de manivelles, traversées maladroitement d’écrous et de vis, dont il manque la moitié des éléments. On les ressort timidement, pendant les vacances scolaires, à l’heure du goûter, en écartant l’étincelant smartphone et en tentant d’initier la petite-nièce ou le petit-fils aux joies du modeste objet éducatif, en l’occurrence le fameux « Meccano » – contraction de « make and know » – venu directement de la plus grande usine de jouets au monde dans les années 1970 ( à Liverpool puis à Calais) et toujours distribué dans le monde entier, 120 ans après sa création, dans des formats cependant plus sophistiqués et robotisés. 

Mais n’allons pas croire que ces jeux éducatifs de la première heure ont fait leur temps. « Les jeux éducatifs n’ont jamais été aussi à la mode qu’à l’ère du numérique. Les systèmes d’assemblage toujours plus astucieux se réinventent à la faveur des nouvelles technologies et accompagnent l’enfant dans son développement » indique le texte de l’exposition. Et ce n’est sûrement pas le brouhaha assourdissant des rires mutins de gamins excités qui le démentiraient. L’espace de l’exposition-atelier en est rempli. Petits et grands redécouvrent les maisons alsaciennes et les villages de bois du XIXe siècle, de facture en majorité allemande, dans la lignée du pédagogue et inventeur du jardin d’enfant Friedrich Fröbel, ainsi que le premier jeu de construction Anker inventé par les frères Lilienthal en 1876, à base de pierres reconstituées. Entre nos doigts, ce patrimoine ludique, inspiré des architectures médiévales, Renaissance ou vernaculaires, évoque l’évolution des systèmes éducatifs et des mentalités. Oubliées ou devenues les stars de nos étagères, ces antiquités familières ont construit l’imaginaire de milliers d’enfants à travers le monde. De manière d’autant plus spectaculaire avec l’arrivée du plastique et la production en série. Le jeu de construction, univers de niche au premier abord, est bien une matrice essentielle de nos vies domestiques et un passeur de générations. En témoigne le chiffre d’affaires faramineux du danois Lego, le géant du secteur, atteignant les 7,5 milliards d’euros en 2021, en hausse significative par rapport aux années précédentes… 

Exposition Architectures en boîte jusqu’au 19 septembre 2022, Cité de l’architecture et du patrimoine, citedelarchitecture.fr