Silvia Costa met en scène Intérieur de Maeterlinck, un drame dans lequel deux hommes doivent annoncer à une famille la mort d’une jeune fille. Il est mis en musique par Joan Magrané Figuera. 

Qu’est-ce-qui vous touche dans Intérieur ?

Je ne connaissais Maeterlinck qu’à travers l’opéra. Ce projet m’a fait découvrir la beauté et la richesse de sa langue. Dans la pièce originale, les figures principales sont un vieil homme et un étranger. Cela m’a touchée car je suis très attachée au mythe et je reconnaissais quelque chose d’archétypal à travers le vieillard. C’est aussi un texte proche de la poésie, plein de mystère. Un mystère pouvant s’ancrer dans le vécu. Maeterlinck a le talent du mystère. Je trouve le sujet très beau. Comment annoncer une mauvaise nouvelle et prendre en charge l’autre, alors que normalement notre connexion à la douleur se fait par la façon dont nous la ressentons personnellement ? C’est un changement de paradigme important et très contemporain. 

Comment procédez-vous pour ouvrir un espace entre ce texte et la musique de Joan Magrané Figuera ?  

On part de quelque chose de très narratif et à mesure que la communication de la nouvelle s’approche, on se dirige vers des mesures musicales, proches des sanglots. Les créations contemporaines semblent très libres parce que souvent la partition est inconnue. Mais la plupart du temps le metteur en scène doit faire confiance au livret et aux échanges avec le compositeur en attendant la musique ! Cette création est plutôt une mise en espace. C’est difficile car il faut être efficace avec peu. Mais le sujet et la musique sont inspirants. Et le fait que Joan me décrive ses idées avec des images est très important.

Qui sera en scène ? 

Joan a condensé le texte en monologue. Six musiciens porteront les autres voix et émotions. Michel Vuillermoz joue les deux personnages rassemblés en un seul. Son visage a des traits pleins de bonté et d’ouverture, c’est nécessaire pour amener cet intérieur vers l’extérieur…

Vous proposez un théâtre nourri d’un travail sur l’image comme moteur de réflexion. L’image aura-t-elle également une grande importance ici ? 

Oui, très. Mais l’architecture du Châtelet sera mon décor. J’ai pris le risque de laisser sa gigantesque scène vide en mettant les musiciens dans la fosse. Le plateau sera parsemé d’installations d’objets qui seront comme des îles pour le comédien. Depuis quelque temps, je tends vers une simplicité des éléments au profit des corps. La difficulté avec Intérieur est justement de réussir à faire jaillir les mots dans les corps. Maeterlinck a écrit que les poèmes meurent quand les humains s’y introduisent. C’est le principal obstacle que j’ai rencontré. Ces personnages sont des âmes sans corps qu’il faut faire exister. La danseuse Flora Gaudin, avec laquelle j’ai déjà travaillé, incarnera la jeune fille morte, la figure de la mère et la nouvelle de la mort. Comme un fantôme qui occupe le plateau dans un méandre obscur. 

Intérieur, Joan Magrané Figuera / Maeterlinck, mise en scène Silvia Costa, avec Michel Vuillermoz, Théâtre du Châtelet les 22 & 23 octobre 2021.

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