Maëlle Dequiedt crée I wish I was. Un spectacle sur un groupe de musiciens amateurs qui vient clore trois années de résidence au Théâtre de la Cité Internationale. 


Lorsqu’elle arrive à la terrasse du café parisien dans lequel elle m’a donné rendez-vous, avant une journée de répétition, la metteure en scène Maëlle Dequiedt, svelte silhouette et sourire éclatant, porte précieusement un harmonium sous le bras. Cet orgue portatif des années cinquante appartenait à sa grand-mère. La jeune femme aimerait qu’il fasse partie de son nouveau spectacle, I wish I was. Une mise en scène pour laquelle elle retrouve La Phenomena, le collectif qu’elle a rassemblé à sa sortie du TNS en 2016 et avec lequel elle avait créé Trust karaoké panoramique d’après Falk Richter, en 2017. 

Ses yeux clairs et son nom de famille m’évoquent de lointaines origines flamandes. Mais les Flandres sont surtout pour elle une influence (elle admire beaucoup Alain Platel et Anne-Teresa De Keersmaeker) et un ancrage artistiques. Depuis 2019, elle y mène avec Simon Hatab, le dramaturge de La Phenomena, une résidence de territoire, à Denain. Un travail qui la passionne notamment parce qu’il permet de connecter le spectacle vivant avec son territoire. Maëlle Dequiedt vient de Nevers. Elle y commence le théâtre à 13 ans à la Maison de la culture et au Conservatoire où elle apprend aussi le violoncelle. La puissance de la musique « qui rassemble à condition de devenir un dialogue autonome dans le spectacle », dit-elle, s’y révèle alors. C’est ce qu’elle veut créer avec I wish I was dans lequel des musiciens amateurs se retrouvent dans un minibus, sillonnant les routes du Nord pour essayer, « le temps d’un week-end, explique-t-elle, de s’inventer une nouvelle forme de vie». Les comédiens de La Phenomena sont musiciens amateurs. Une fragilité séduisante pour Maëlle Dequiedt et Francisco Alvarado, le compositeur du spectacle qui « recrée et recompose les chansons qui forment la « bande originale » de la vie des personnages ». I wish I was est aussi l’exploration de sa passion pour l’utopie des collectifs que Maëlle Dequiedt analyse avec lucidité : «ces aventures font rêver mais il faut se battre pour les faire exister ». Elle me concède dans un sourire que oui, à la fin, c’est elle qui tranche. Elle imagine surtout le collectif comme un endroit où « les interprètes sont aussi auteurs et créateurs à part entière ». Simon Hatab, présent à notre rendez-vous, cite Jacques Rancière, dont les écrits les inspirent : « il n’y a pas de discours émancipateur si on ne laisse pas de place au locuteur ». Une question politique, selon Maëlle Dequiedt : « le collectif, et de manière plus générale le groupe rassemblent des désirs communs et divergents et interrogent la façon dont on peut former une organisation ». Une organisation qui prend la forme d’une aventure, le temps d’un spectacle-concert où la musique raconte aussi la force des liens dits faibles et la puissance ineffable du rêve collectif. 

I wish I was, Maëlle Déquiedt, Théâtre de la Cité Internationale, du 12 au 27 octobre 2020

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