olliAvant de faire connaissance d’Olli Mäki , on les avait tous à peu près rencontrés un jour ou l’autre en salle. Jack LaMotta, tabassé par Scorsese dans Raging Bull , Marcel Cerdan tué par Olivier Dahan dans La Môme  et surtout Ali  sanctifié sur du Sam Cooke par Michael Mann. Sans oublier les exploits de Mike Tyson et quelques autres, anonymes ou fictifs, devenus aussi célèbres que les vrais champions : la boxeuse d’Eastwood (Million dollar baby ) et, évidemment l’étalon Rocky  avec sa bouille de Droopy amoché. C’est donc une évidence que le film de boxe est un genre en soi, tout comme le western, avec ses codes, dont la plupart sont empruntés à la littérature du même genre où se sont illustrés pêle-mêle Jack London, Joyce Carol Oates et Norman Mailer. Pour chaque combat, c’est toujours le même enjeu, celui de l’homme dans la société et qui cherche, à chaque uppercut, à chaque coup de boule à s’élever, à retrouver sa dignité. Si ce film finlandais fait mouche, s’il a remporté un bien joli Prix Un Certain Regard au dernier Cannes, c’est peut être parce qu’il concourt l’air de rien dans une tout autre catégorie. Celui du biopic boxeur certes, mais élégiaque, romantique. Contre toute attente, le film est presque dépourvu d’enjeux dramatiques. Olli Mäki est bien un poids plume fameux de la lointaine Finlande et un champion d’Europe. Né en 1936, il a combattu le champion du monde américain Davey Moore (qui allait décéder l’année suivante après un combat). Kuosmanen n’a que faire de la légende ou de l’aura de son champion. Il se moque du combat. Il suit simplement l’entraînement du garçon en vue de ce match, ses doutes aussi. Ce qui intéresse Kuosmanen, c’est sa rencontre avec une jeune femme. Leur histoire d’amour est la plus simple, la plus évidente que l’on ait vue depuis certains films de Blake Edwards des années 70 et 80. Se dessine au fil de leurs balades le portrait étonnant d’un jeune homme épris et rêveur, absolument détaché de son sport et de ses enjeux habituels. Mäki se prête donc de mauvaise grâce aux conférences de presse, ne jouant jamais le jeu du spectacle médiatique, au grand dam de son agent. Mäki est amoureux et ce combat l’ennuie. Pendant un instant, on pense que ce combat pourrait le tuer et le faire passer à côté de l’amour. Mais ce n’est pas le sujet du film. Le suspens est évacué rapidement par une belle séquence presque muette de complicité (harmonies des visages). Pour Mäki, c’est au fond la seule chose qui compte. Dans un noir et blanc que l’on pourra juger trop arty , trop nostalgique, sur un ton doux que l’on pourra juger pas assez vivant, le cinéaste compose une balade, un moment de suspension face aux désordres ambiants et aux films gonflés aux rivalités et aux péripéties artificielles. C’est l’anti Raging Bull  par excellence. Un film qui caresse au lieu de chercher à vous mettre KO.