wakamatsu

Koji Wakamatsu, ex-empereur du « pink » (séries Z lubrico-perverses à la sauce nipponne), était la vigie de la mauvaise conscience de l’archipel. United Red Army, petit théâtre doloriste et convulsif, disséquait impitoyablement l’incubation et le déchaînement de la violence d’extrême gauche. Avec ce 25 novembre 1970 : le jour où Mishima choisit son destin, il s’attaque au prurit réactionnaire et militariste des années 1970, à ce parfum nauséabond de nostalgie nationaliste qui a enivré plus d’un Japonais. Yukio Mishima prouve ainsi qu’on peut être un immense écrivain, collectionner les distinctions (Nobel en tête) et les oeuvres de génie, et se laisser envoûter par les sirènes grossières d’une idéologie d’extrême droite. Le jour où… n’est pas l’enfance d’un chef, mais la mort d’un petit chef. Les dernières années de la vie de Mishima sont marquées au sceau de l’activisme : création d’une milice, avec uniforme et tout le folklore, tentative en forme de baroud d’honneur amateur pour réveiller ce qui reste d’armée japonaise, et seppuku sordide en guise de coda. Wakamatsu réalise un grand film, à la fluidité classique, aux couleurs étouffées, sur un aimable raté de l’histoire. Raté, car la milice de l’écrivain n’est finalement qu’une bande de gamins, aimables, car Mishima n’a rien de monstre, il est plutôt the guy next door. Mais il faut voir la façon dont son visage se fige dans une hébétude hallucinée, la solennité qui l’habite soudain lorsque, en uniforme, devant le disque rouge du drapeau japonais, il s’adresse à ses hommes. Au-delà de la tranche d’histoire, Wakamatsu donne à voir ce qui était peut-être la grande énigme psychologique du xxe siècle : des types ordinaires soudains possédés par la folie des idéologies. 25 novembre 1970 : le jour où Mishima choisit son destin est une généalogie de la violence politique au Japon sous forme d’épure zen et ironique.